• ciel de garance... la lumière soutient les nuages qui s'amoncellent dans le ciel... cela annonce un temps douteux pour demain.  L'air s'épaissit, et retient presque toutes les couleurs du spectre lumineux, sauf le rouge qui trouve toujours le moyen de s'aménager un passage pour dérider la fin de journée. Le vent continue à gémir devant la porte, ramenant par congère les feuilles mortes de la forêt. Difficile d'entendre les chouettes, difficile de saisir autre chose que ce vent qui se déchaîne en bourrasque. Sur le versant, en face, une maison s'éclaire. Cela n'est pas courant, mais je suis heureuse de voir trembler ce point de lumière entre les arbres. 

    La montagne se dépeuple, et avec elle, les cris et les rires d'enfants, de bétails, et toutes les histoires qui les animent. Les maisons se renferment sur leurs odeurs, les jardins reprennent leur aspect sauvage, les vergers se protègent de ces absences en laissant ronces et genêts occuper le terrain. Faute d'être entretenues, les sources se détournent de leur captage à la recherche d'autres âmes à désaltérer. Dans cet arrière pays escarpé, un cycle se termine, celui des vies et des survies, des batailles et des renoncements.  Un autre commence, celui des contemplations et des rêves, celui des attentes et des considérations, celui qui souhaiterait peut-être prendre racine quelque part dans l'espace, et veiller sur le temps.

     

    de garance ce soir

    le ciel  parle du temps qu'il fera

     

     

     


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  • les variations du climat, modulent mes jours, et mes nuits avec cette pointe de caprice qui met sans cesse mon humeur à l'épreuve. La solitude dans les montagnes éveille dans mon corps, dans ma tête  cette sensibilité qui me permet de comprendre de mieux en mieux le ciel, les nuages et les étoiles... Depuis hier soir, il souffle un vent particulièrement violent... les arbres se plient et grincent d’insatisfaction... je m'abrite sous quelques couches de vêtements supplémentaires, reprends mes outils, et remonte dans la forêt le dos courbé par le froid, aussi mécontente que toute la montagne qui m'entoure...

     

    vent violent

     les poules en perdent

    leurs plumes

     

     


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  • la pluie se remet à tomber ce soir... une alternative à la neige qui a recouvert il y a deux jours les montagnes, et qui l'a fait fondre bien plus vite que n'importe quelle autre humeur climatique...

    j'ai des ampoules aux mains, les doigts et le dos engourdis...  le travail en forêt reste toujours aussi astreignant, et selon ce qu'il y a à faire, le corps ne réagit pas de la même façon. Je me retrouve alors surprise de voir des blessures ou des douleurs se former là où je croyais que tout était rodé...

    je rentre au chaud, fatiguée et fourbue, mais de cet épuisement qui me rend heureuse parce que j'ai accompli le travail que je souhaitais réaliser...

    trop mal aux mains pour reprendre les pinceaux... je remets une bûche dans le poêle et m'installe tout contre lui. C'est de chaleur dont j'ai besoin, de chaleur et de silence... mais celui-ci vient tout naturellement ici, surtout lorsqu'on est seul.

     

    laissant la forêt en veille

    ce soir

    seule juge de mon travail

     


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  • retour aux étangs retour aux oiseaux, pour une fin de semaine tout en beauté, malgré un vent et un froid un peu trop rudes... Au bord de l'eau les degrés ne sont pas les mêmes qu'ailleurs, ils ont une mesure à eux... une mesure qui varie selon les murmures qui viennent du large... Impression d'hiver, les oiseaux ne se bousculent pas sur les vasières, mais dans la sansouïre, le minuscule pouillot véloce, nous suit avec insistance, allant de roseaux fanés en brindilles ternis par le sel, poussant son cri monotone et répété tout  le long de notre balade... Plaisir ordinaire d'un moment de partage avec un être pesant à peine quelques grammes... Dès lors où nous acceptons de le recevoir, le poids du bonheur n'a comme valeur, que celle qu'on  lui accorde.

     

    durci par le sel

    le roseau résiste

    avec ou sans oiseaux

     

    photos M. Dietrich

                      

     


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    est-ce le rêve qui crée la vie ou la vie qui crée le rêve ? l'oiseau vole t-il dans mon rêve ou est ce moi qui niche dans sa tête ? Voilà des questions auxquelles je ne désire aucune réponse... voilà des réponses que je préfère éternellement libres d'elles-mêmes... les emprisonner, tend à aggraver le désordre du monde qui ne cesse de se métamorphoser... laissons lui le temps de prendre ses mesures, sans vouloir toujours contribuer à ce changement... Nous sommes trop maladroits, trop ignorants et trop lâches pour prétendre pouvoir nous mêler de ce que nous ne sommes pas déterminés à comprendre.

    alors...nous saccageons tout....

    il faisait nuit lorsque je me suis levée ce matin... nuit d'hiver qui  comme tous les jours de cette saison, retient ses lourdes tentures chargées de fantômes et de froid.... Poussant la porte de la cuisine, la jeune chatte passe comme une ombre furtive entre mes jambes... avec elle, les quelques gouttes de pluie que le vent à pousser contre les montagnes... Entre le cèdre et la forêt de châtaigniers, deux chouettes échangent leurs impressions et leurs intentions...

    loin de là... loin de moi...  le monde se divise et se broie. Je souhaite encore une fois, trouver le courage de combattre cette évidence en continuant à  évoluer dans la quiétude conforme à la nature des choses et des êtres .

    Ce matin, le bavardage des  chouettes me rappelle que j'en suis toujours capable...

     

    encore une bûche dans le poêle... juste avant de sortir...

     

     


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  • les nuages absorbent la montagne, comme un buvard tout neuf qui se gonfle d'encre...  le jour refuse de se lever... gris-noir... ou noir-gris,  les couleurs ce matin, ne veulent pas faire surface... aujourd'hui, je me laisserai moins distraire par la lumière... Tant qu'à choisir un ton chromatique, autant le prendre dans ce que la nature m'offre en ce moment... des variations de gris, pour une symphonie de jour d'hiver... cela n'en reste pas moins facile, car pour l'instant tout se dessine au delà des pinceaux...

     

    paysage d'hiver

    seuls le blanc et le noir

    font surface

     


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    ce soir j'ai juste envie de me souvenir de choses sans ombre et sans discours.... retour de cette grande marche contre la terreur et pour la liberté de penser, où nous étions pas loin de 100 000 personnes, ce que je n'ai pas de mal à croire... j'ai l'esprit vide et ne pense qu'à ces hommes et femmes tués  qui ne sont que des hommes et des femmes  que les nuages ne cacheront jamais...

    un peu de Japon revient à ma mémoire... et je dédicace ce haïku à mon amie Harumi... elle qui a vu tant de lunes dans les rizières de son pays ...

     

    vue du Japon

    dans chaque rizière

    flotte un soleil

     

     


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  • il fait encore nuit, et dans cette obscurité toute relative, se prépare une nouvelle journée dans ces montagnes perdues. Il m'en reste deux à passer avant de redescendre en ville. Mes passages urbains sont de plus en plus courts, de plus en plus sibyllins. L'appartement où je passe mes rares instants citadins, est entouré d'oiseaux, mais ils n'ont pas la liberté de ceux des montagnes, et par excès de bruits nombreux et variés qui les parasitent, l’énergie qu'ils mettent à se faire entendre,  me donne le vertige.

    Je me replie sans cesse là où mon cœur, me conduit... sans vague et sans histoire, je reviens toujours à mes origines... celles d'une petite fille qui n'a jamais su quitter la vie sauvage qui l'a aidée à grandir. Je n'ai plus de domicile "vraiment" fixe et m'en vois ravie... De lieu en lieu, j'essaie d'apporter mon aide et mon soutient aux proches qui me le rendent généreusement. Tous les jours mon envie de vivre décuple avec le sentiment de vieillir sans ravage... Tous les jours ma soif de connaissance stimule ma volonté de  mourir un jour sans ombrage.

    ça y est, le jour se lève,  il me faut retourner nourrir les bêtes...

     

    d'un jour à l'autre

    se rallonge l'ombre du cèdre

    toujours penché

     


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  • pic épeiche ! ... oui, c'est bien lui que j'entends marteler avec obstination le tronc d'arbre au dessus du jardin... les insectes circulent en mode de printemps. Sittelles et pics en tout genre loin d'être ignorants sur l'étonnante douceur hors saison, s'en remplissent le ventre.  Le jour se lève sans aucune contradiction, le ciel est toujours limpide et les sommets d'en face découpent avec la même pertinence les limites de l'horizon... la nuit tombe un peu plus tard... Dans le jardin les aulx plantés en décembre, percent la terre cendrée sans s'exciter... tout  évolue au rythme d'une saison hors du temps... j'ai l'impression d'être la seule à m'en étonner... mais comme pour tout ce qui respire autour de moi,  je me laisse offrir sans aucune résistance les mêmes plaisirs, les mêmes délices... Derrière le bardage de l'atelier, les chauves- souris négocient leur sortie, mais il est vraiment trop tôt pour cela, et aucune ne se décide vraiment... Adaptation ou pas, les animaux s’accommodent de ce qui leur est offert, sans préjugé, sans inquiétude, juste avec ce qu'il faut de lucidité pour ne pas se laisser détourner par la situation...

     

     soleil de midi

    l'hiver a perdu son défi

    tout le monde somnole

     

     

     


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  • aujourd'hui、le bleu du ciel est d'une telle intensité, qu'à travers les grandes baies vitrées de l'atelier,  mes yeux ne cessent de se déconcentrer. Difficile de résister à cette couleur d'hiver... difficile de ne pas laisser errer son esprit dans cette homogénéité accomplie. Versant Sud-Ouest, la terre et le roc renvoient ce que le soleil leur offre... une chaleur que l'on souhaiterait de printemps... Le coq nègre-soie, veillant sur les poules avec témérité, chante sous les châtaigniers. Renards et blaireaux ne sont jamais très loin, la liberté a un prix, et il sait, même s'il est nain, qu'il doit à tout prix défendre sa tribu. L'âne, les yeux fermés, se charge de cette douceur hors saison avec un flegme que l'âge et le temps lui ont taillé sur mesure... Les abeilles séduites par tant de douceur sortent de leurs ruches cherchant de quoi butiner... mais les fleurs sont les grandes absentes de cette journée de chaleur... et les faiseuses de miel doivent désespérément s'en retourner le ventre vide... 15 h 55 le soleil passe derrière la montagne... il faut qu'il s'élève encore un peu pour dépasser ces mille mètres qui s'imposent comme une fatalité et permettre aux habitants de la vallée de bénéficier en un seul effort d'une heure de plus de chaleur.

     

    à la limite de l'indigo

     coin de ciel

    derrière la vitre

     

    藍の限界、空の隅ガラスの背後にある

    ai no genkai sora no sumi garasu no haigo ni aru

     

     

     

     


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  • le jour se lève  sur le versant d'en face. J'ai quitté les montagnes de l'Est pour celles un peu plus du Sud. Il y fait moins froid, mais le feu dans la pièce où je dors s'est éteint ... enfilant mes couches de vêtements comme un oignon en prévision d'un froid légendaire, je rallume le poêle de la maison... le bruit du bois qui crépite me monte à la tête et me redonne vie... D'abord les poules, puis le vieil âne, à chacun son lot de nourriture et de mots doux pour la journée. Mon regard s'égare sur la tombe du chien creusée au pied du cèdre.

    Seule dans ces montagnes d'hiver... le temps est un ami précieux qu'il faut sans cesse flatter. Appliquant la majeure partie de sa cadence avec une rigueur indiscutable, il m'annonce que à force d'accumuler les minutes d'ensoleillement derrière les nuages, il m'a permis de gagner une demie heure supplémentaire sur ma journée. Mon espace imparti aux tâches quotidiennes se rallonge, cela me convient parfaitement. De plus dans sa grande générosité, le soleil aujourd'hui, me fait grâce de sa présence. Déclinant sa lumière entre les arbres nus, il semble m'inviter au travail...  je ne saurais résister à tant d’encouragement et repars à mes occupations, comme un moine à ses prières... le cœur sans attache...

     

    au pied du cèdre

    où il a pissé

    la tombe du chien

     

     

     

     


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  • ciel de neige dans une forêt aux contrastes accentués par les soixante centimètres de blanc qui l'enveloppent... j'ai l'impression de marcher dans une estampe de maître fraîchement terminée. Peinture de saison, l'artiste n'a pas oublié d’effacer son emprunte.  Il n'y a  pas de vent pas de bruit... le silence est tellement intense que je perçois mes pensées comme un chuintement intérieur... Le crissement des raquettes s'enfonçant dans la neige se conjugue avec celui plus profond de mon compagnon de marche. Tantôt loin, tantôt près l'un de l'autre, les bruits de nos pas s'accordent avec la fatigue qui s'accentue dans la montée... Les pensées houleuses du départ se sont dissipées dans ce monochrome glacé. Tête vide, je continue à marcher dans les pas de mon compagnon.  Le brouillard cristallise l'eau autour de nos cheveux, la tresse qui sort de ma capuche se garnit de glace...  il n'y a pas de vent... les  traces de toute vie semblent avoir été absorbées par la neige et les nuages... Pourtant quelque part, sous les couches qui s'accumulent, se préservent celles que je devine plus sauvages, plus rebelles,  plus secrètes... Dans les arbres, dans le ciel, dans la neige encore poudreuse je soupçonne leurs présences passives...

     

     rumeur de neige dans le sous bois...

    les arbres gardent une couleur d'encre

     

     

     


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  • Il y a des soirs comme celui ci, où la fracture du temps se fait ressentir comme de longues absences... absence de soi, absence de l'autre ou de ceux qu'on aime... absence aussi d'un pays dont je sais qu'à chaque fois que je le quitte je laisse quelque chose d'essentielle ... Cet essentiel, j'en ressens son manque  sans pouvoir le définir... un vide, un plein où je me réfugie, sans jamais en connaître le contenant. Ce soir je suis loin du Japon, je suis dans d'autres Alpes... la neige est annoncée par couche successive... C'est l'hiver et cela n'a rien d’exceptionnel... mais dans mon cœur, je ne sais plus où je suis... j'ai l'impression d'errer entre les saisons, l'impression de perdre le sens des réalités...  Plus je m'isole des émotions, plus je m'éloigne du plein... et dans le vide je n'ai pas encore trouvé la direction à prendre... Aimer, être aimé, voilà une dimension surréaliste, où le coup de pinceau  cherche toujours  son énergie...

     

    un plein  un vide

    le pinceau se tait

    sur leurs contenances

     

     


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    moitié de traces

    sur la neige dispersée

    le reste a disparu

     


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  • je hais ces périodes de fête... tout n'est que jeu de rôle et faux semblant. Seuls, les enfants dans leur innocence primaire, se laissent emporter par les rêves. Qu'importe les rêves d'ailleurs, du plus simple au plus complexe ils restent ce qui leur est de plus précieux...

     

    fête de fin d'année

    forêts et plantations pleurent

    leurs disparus

     


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